[Lecture] La Ligne Verte, une belle (re)découverte

Je suis une grande curieuse. Et parfois ça a du bon ! Il y a quelques mois j’ai acheté le livre de Stephen King, La Ligne Verte alors que j’avais vu (et énormément apprécié) le film une bonne dizaine de fois auparavant. J’avais malgré tout envie de savoir comment le bouquin était « fait » par rapport au film.

Le livre est découpé en six épisodes :

– Deux petites filles mortes
– Mister Jingle
– Les mains de Caffey
– La mort affreuse de Delacroix
– L’équipée nocturne
– Caffey sur la ligne

(Si vous avez déjà vu le film, vous arriverez sans doute à visualiser à quels moments ces titres correspondent.)

Le gardien chef du bloc E, Paul Edgecombe, arrive à un moment de sa vie où il a envie d’écrire ses mémoires. Le style est vraiment chouette, drôle à certains moments (d’un humour assez grivois parfois !), plutôt facile à lire, accessible sans aucun doute, et franchement bien écrit. On y trouve de très belles phrases.

Le livre est en fait plus profond, plus fouillé, plus exacerbé que le film (sans en devenir trop long ou chiant). J’ai d’ailleurs été déçue sur un point : le film est fidèle au livre dans l’ensemble, mais il y a néanmoins des passages dans le livre qui sont sublimes ; c’est un crime de ne pas les avoir retranscrits ! Quelques nuances également, dont je ne comprends pas bien l’effet (en fait, le film se veut plus porté sur le côté « magique » et surnaturel et c’est très dommage). Par exemple, dans le film, John Caffey « force » Edgecombe à voir qui a tué et violé les deux petites (si vous avez vu le film, vous voyez de qui je veux parler ;)). Dans le livre, Edgecombe le comprend tout seul, à force de « pressentiments » et de déductions logiques. Il est vraiment déterminé à découvrir la vérité et joue les détectives, ce qui n’apparait pas dans le film puisque la vérité lui arrive toute cuite dans la bouche…

Pour vous donner un exemple, il est dit notamment que Caffey est accusé d’avoir appâté le chien des Detterick (les parents des fillettes) avec une saucisse avant de lui avoir tordu le cou pour éviter qu’il aboie lorsqu’il enlèverait les filles, saucisse se trouvant dans un paquet dans sa poche, qui contenait aussi un sandwich. Le paquet avait donc été ouvert puis reficelé selon les juges. Or, Edgecombe lui tend un jour sa chaussure et se rend compte que Caffey est incapable de se souvenir comment on fait un nœud ; il n’a pas donc pas pu ouvrir le paquet et le refermer avec la ficelle… entre autres. Il est aussi dit qu’Edgecombe ne peut pas sauver John Caffey ; l’affaire ne pourrait pas être rouverte, puisqu’on préfère exécuter un « nègre innocent » plutôt qu’un « blanc coupable ».

Tous les sentiments, toute l’angoisse, la culpabilité, la tristesse et le désarroi sont amplifiés dans le livre, John Caffey y est 1000 fois plus touchant, Edgecombe pleure souvent et est totalement dévasté de devoir « tuer ce miracle envoyé par Dieu ». Juste avant l’exécution de John, Edgecombe va s’agenouiller avec lui pour prier, et va se mettre à pleurer. Paradoxalement, c’est Caffey qui va l’aider à se relever. Un moment magnifique, joliment écrit, et malheureusement absent du film. Le film a sans doute été réalisé de façon plus « neutre », dans un pays où la peine de mort est encore d’actualité…

A l’inverse du film, on sait ce qu’il advient de la souris (Mr Jingles), de tous les autres gardiens, de la femme de Edgecombe, puisque le gardien a survécu et continue de survivre à tout le monde depuis que John Caffey lui a tenu les mains…

Bref, tant de petits ou de gros détails si jolis qui ne figurent pas dans le film ! Je ne regrette absolument pas cette lecture, elle m’a vraiment bouleversée et je la relirais volontiers une prochaine fois.

Le petit extrait connu de (presque) tous, juste pour la beauté des mots :

Boss, j’suis fatigué à cause de toute la souffrance que j’entends et que j’sens. J’suis fatigué de courir les routes et d’être seul comme un merle sous la pluie. De pas avoir un camarade avec qui marcher ou pour me dire où on va et pourquoi. J’suis fatigué de voir les gens se battre entre eux. C’est comme si j’avais des bouts de verre dans la tête. J’suis fatigué de toutes les fois où j’ai voulu aider et que j’ai pas pu. J’suis fatigué d’être dans le noir. Dans la douleur. Y a trop de mal partout. Si j’pouvais, y en aurait plus. Mais j’peux pas.
-Arrête, j’ai essayé de dire. Arrête, lâche-moi les mains, je vais me noyer si tu me lâches pas. Me noyer ou exploser.
-Vous exploserez pas, boss, il a dit en souriant un peu à cette idée… mais il a libéré mes mains.

La Ligne Verte – Sixième épisode « Caffey sur la ligne »

 

Bonne soirée à toutes !